La surface frontale de la coque seule peut être approximée par le produit franc-bord × maître-bau, les flancs du voilier étant relativement verticaux, comme le montrent ces deux plans qui représentent le Gib'Sea 282 (le premier) et le Dehler 28[1]. Ils nous serviront d'exemples dans ce billet. Les coques de ces deux 28 pieds mesurent respectivement 8,0 et 8,5 m (avec un bau maximum de 3,15 et 2,80 m, les baux à la flottaison valant 2,68 et 2,44m[2]), alors que les longueurs à la flottaison sont assez voisines: 7,24 contre 7, 14 m.




Prendre le franc-bord avant (1,10 et 1,06 m), et non le franc-bord milieu (1,00 et 0,86 m), c'est obtenir une valeur légèrement par excès de la surface frontale, ce qui est le choix que je ferai pour toutes les estimations.
Il est plus difficile d'estimer la surface frontale du roof. On conviendra de mesurer sa hauteur maximale par rapport au franc-bord avant sur un plan de profil (0,50 et 0,41 m) et d'estimer sa largeur (2,39 et 2,00 m) en soustrayant deux fois la largeur des passavants (0,38 et 0,40 m) du bau maximum, ce qui doit donner également une valeur légèrement par excès.




Nous obtenons donc pour nos deux exemples 4,7 et 3,8 m² (3,15 × 1,10+ 2,39 × 0,5 et 2,80 × 1,06 + 2,0 × 0,41). Les roofs contribuent environ 26 et 22% à la surface frontale. Notons que les roofs sont vraisemblablement plus hauts en proportion sur les petits voiliers afin de donner une hauteur sous barrot suffisante dans la descente.

Tournons-nous maintenant vers le mât, qui participe bien sûr à la traînée induite par le vent, mais avec un autre coefficient que celui de la coque..
Pour la hauteur, le plus simple est de la mesurer sur un plan. On peut aussi bien sûr envoyer un double décamètre en tête de mât (nous présenterons bientôt une statistique sur l'estimation de la hauteur du mât en fonction de la surface de la GV et de la longueur de la bôme, qui portera sur plus de 100 bateaux, à partir des certificats ORC disponibles sur internet). Pour nos deux voiliers, les mâts font 10,2 et 11,5 m de haut (le tirant d'air moins le franc-bord avant, comme suggéré dans un précédent billet, donne 10,6 m et 11,8 m, ce qui n'est pas une mauvaise estimation).
Le diamètre transversal du mât est facile Ă  mesurer sur place, mais difficile Ă  mesurer sur plan ! Une statistique (encore provisoire) donne 0,10 m environ pour des voiliers de cette taille, mais la dispersion est importante (pour une mĂŞme rigiditĂ©, on peut choisir plusieurs combinaisons de diamètre transversal et longitudinal). Les surfaces frontales valent donc très approximativement 1,0 et 1,2 m².

Pour être complet, il faut enfin tenir compte de tout le haubanage: étai, pataras, (bas-)haubans, inter... L'ordre de grandeur est de 6 fois la hauteur du mât, avec un diamètre moyen (estimé) de 6 mm, donc 0,4 m². (Pour le voilier type de 10 m à la flottaison analysé par Larsson & Eliasson (à double barres de flèche poussantes), la longueur totale est de 101 m pour un mât de 16,9 m de haut, un rapport de 5,97). Mais il faut noter que les voiliers 'anciens', à barre(s) de flèche perpendiculaire(s), ont souvent un haubanage plus complexe, donc plus long, que les bateaux récents, ce dont on doit tenir compte. Nous retiendrons une valeur de 6,5 fois la hauteur du mât.

Pour obtenir la force aérodynamique totale, il faut ensuite appliquer, pour chacune de ces trois sources, le coefficient convenable dans la formule fondamentale, et en faire la somme. Nous le ferons dans un prochain billet, en discutant les choix. Mais je peux d'ores et déjà vous révéler qu'elles sont d'environ 17 kg pour le Gib'Sea 282 et de 15,5 kg pour le Dehler 28 à 15 nd de vent...C'est le surcroît de force que vous devrez exercer sur la ligne,en plus du poids de la chaîne, pour remonter le mouillage.
Et nous sommes bien dans les ordres de grandeur (un peu en-dessous cependant) de ce qui a été mesuré pour le Cascade 27 (LOA 8,23 m; LWL 6,55 m) du précédent billet (18 kg)...

A suivre...


PS: Pour les ignares, la Coreff est une bière bretonne... D'après l'historien et linguiste Fleuriot, ce mot a même origine que le mot cervoise

Notes

[1] Revue Bateaux n° 372 Mai 1989; nous avons choisi ces deux modèles sans raisons particulières

[2] A noter que, selon des statistiques que je présenterai plus tard, le bau à la flottaison (Bflot) est statistiquement lié au maître-bau au niveau du (livet de) pont (Bmax) par la relation Bflot = 0,793 × Bmax + 0,125 (m).